Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
systemique
3 novembre 2005

jeux pour chômeurs.

Etude systemique sur le chômage

Travail de diplôme d’intervenant en systémique          Gilbert Grandchamp          2005

grg

         Le grg

                          Jeux pour personnes au chômage


A Marie-Claire qui m’a soutenu pendant mes deux ans de chômage,
à toutes les personnes aux chômage qui construisent une histoire nouvelle et originale,
à toutes celles qui ne construisent rien,

à tous ceux qui se battent pour donner du sens à leur vie.

Aux participants d’Ateliers 36 qui ont construit le jeu
et à leur encadrant, Christian Rochat.

A la Ville de Lausanne (ETSL) qui a financé ma formation.

Nous nous baignons et

nous ne nous baignons pas dans le même fleuve
                           
(d’après Héraclite Ve s. avant JC)

Copyright Gilbert Grandchamp, e-mail: gilbert.grandchamp@lausanne.ch


Table des matières                                                               table des matières

Préface

Avant-propos

1. Contexte

2. Prise de conscience: la fragilité

3. Comment s’en sortir

4. La personne au chômage peut améliorer sa vie personnelle

5. La personne au chômage peut améliorer sa vie professionnelle

6. La personne au chômage peut améliorer sa vie sociale

7. Employabilité et réseau

8. Jeux pour personnes au chômage

9. Bibliographie


Préface                                                                                               préface

Je rêve souvent d'un temps où le travail ne serait pas obligatoire, le réveil inutile et les vacances à l'année…

…Au chômage!…

J'aurais dû me réjouir. Mais l'impression d'y être pour quelque chose dans cette restructuration m'empêchait de marcher la tête haute, ou même normalement, comme avant.

Alors j'ai bien dormi quelques fois, sans réveil-matin, pour rattraper la vieille fatigue comme on dit. Mais le bruit de la porte de l'appartement qui se refermait sur ces travailleurs en partance me réveillait tous les matins.

J'avais du temps, et des livres qui avaient tant attendus que je puisse m'y plonger avec délice. Mais il y avait le ménage, les repas, la lessive…

Mon conseiller ORP était très gentil. Il m'a donc assignée à suivre le cours dont j'avais besoin pour mieux me réinsérer dans le monde du travail, tout en m'expliquant qu'une personne au chômage n'était pas censée se risquer à la terrasse d'un café — quand des gens comme lui doivent travailler…— sauf éventuellement pour un entretien d'embauche !

Les participants au cours étaient eux aussi très sympas; mais la classe était grise, et le formateur imprégné d'offres d'emploi, de délais-cadre et de droits aux indemnités.

"Mieux ça qu'une jambe cassée", m'avait dit une amie pour plaisanter. Mais je ne voyais plus mes amies, car elles travaillaient, et mon chômage durait malgré mes dix offres d'emploi mensuelles.

Mon médecin m'a expliqué que mes insomnies étaient normales dans ma situation, mais que les médicaments pouvaient engendrer une accoutumance.

J'ai pas bien compris ce mot.

Aujourd'hui, j'ai retrouvé du travail, des nuits de sommeil réparatrices, mes amies, et la tête haute.

Mais je sais que si j'avais rencontré Gilbert Grandchamp plus tôt, j'aurais osé fréquenter les terrasses des cafés avec mes amies, lire mes livres, dormir le matin, même faire du ski, et me réjouir de la chance que j'avais de pouvoir faire une pause et un bilan dans une vie profession­nelle qui me mènera, d'ici 25 ans, à la retraite !

                                                                                                        Marie Santerre


Avant-propos                                                                               avant-propos

Mon souhait est que ces jeux puissent être utilisés par toute personne qui doit traverser le chômage.

Je tiens à aborder la complexité du chômage de cette manière afin d’en dégager un état d’esprit, une vision, une sensation.

Car être au chômage, c’est souvent avoir la boule à l’estomac.

Je tiens également à poser très clairement le contexte dans lequel la personne au chômage se trouve, car préciser ce contexte donne du sens, définit des limites et tisse la toile des liens et du réseau dans lequel cette personne évolue. (1)

Le chômeur doit traverser le chômage. Il n’a pas le choix. Il le fait d’autant mieux si son estime de soi n’est pas trop mise à mal, (2) s’il peut activer ses ressources, développer ses compé­tences, et prendre conscience de la fragilité de sa situation.

Il ressemble un peu au tourbillon d’une baignoire qui se vide… Créé par les circonstances, il est maintenu en équilibre par le flux des forces qui l’entourent. Le tourbillon permet par son état provisoire que la baignoire se vide. La personne au chômage est l’eau et pas l’eau à la fois. (3)

Elle est indispensable au système économique actuel et, en même temps, elle est rejetée, puis réinsérée ou recyclée par lui. Et cette personne ne peut pas sortir de cette position fragile sous peine de sanctions. La seule issue pour elle est de trouver du travail le plus rapidement possible.

Mais dans cette situation difficile, il existe une petite marge de manœuvre que je souhaite faire découvrir.

Proposer une dizaine de jeux pour personnes au chômage est une manière ludique de trouver cette marge si tant est que, de façon lucide, le chômage est abordé sous l'angle "année sabbatique" ou "pause bienvenue". Même si cela n’est pas vrai, et malgré les contraintes, voir le chômage de cette façon ouvre des portes, des horizons — pas forcément réjouissants — et contribue ainsi à la réinsertion professionnelle des gens concernés. Changer de langage change notre regard et crée une autre réalité, qui peut donner à son tour un autre sens à cette épreuve de plus en plus incontournable.


1. Contexte                                                                                       contexte

Du chômage conjoncturel au chômage structurel

Imposé par la vague néolibérale dans laquelle nous baignons depuis plusieurs années, nous assistons progressivement à un élargissement du sens donné au mot "chômage". Si ce dernier était considéré comme un accident de parcours limité à certains secteurs, aujourd’hui il devient de plus en plus structurel, et est considéré comme faisant partie des outils du management. Une bonne entreprise se restructure en permanence. La valeur principale n’est plus le travail en lui-même, mais la valeur financière de l’entreprise. La bonne santé de l’économie est à ce prix-là…

Ainsi, au lieu d’être une assurance-accident, l’assurance-chômage est devenue une assurance-maladie. (4)

"L’employabilité d’une personne résulte de la relation entre ses compétences, sa disponibilité, et les besoins du marché du travail.

La prise en compte de chaque type de ressource permet d’établir un diagnostic précis sur l’état global de l’employabilité de la personne et de choisir le remède le plus approprié.

L’identification, la définition et l’évaluation de l’employabilité doit reposer sur une démarche réfléchie et partagée au sein des structures de prise en charge."

Extrait d’une conférence de A. Spagnolo, Observatoire Romand et Tessinois de l’Emploi, 2004

Le chômeur est un malade

Créer des malades est la seule manière que notre système ait trouvé pour rester en bonne santé et la seule aussi de garder bonne conscience. Etrange paradoxe qui consiste à ne pas s'avouer avoir besoin d’un réservoir de main-d’œuvre, à fabriquer des malades… et aussitôt à tenter de les guérir.

Pour bien analyser cette idée, il faut introduire la notion de temps qui passe. La personne au chômage peut prendre conscience qu’elle est utile à l’équilibre du système et qu’elle contribue à son développement. Mais, peu à peu et plus les mois passent, plus le discours induit par le même système lui fait comprendre de manière répétitive que si elle ne retrouve pas un emploi c’est de sa faute, de sa responsabilité et que, de plus, elle coûte cher à l’assurance-chômage.

Alors s’insinue en elle une étrange culpabilité, car elle se rend compte qu’elle est un facteur de déséquilibre et que tout cela est probablement de sa faute.

Le chômeur est un déchet

Non seulement la personne au chômage est un malade mais aussi un déchet. Son identité professionnelle et sociale mise cause, elle s’aperçoit que le système essaie de la recycler, voire de la composter par l’intermédiaire de cours, d’emplois subventionnés, de stages. De plus l’esprit de la loi sur le chômage est fait pour gérer des bons déchets et prévenir les abus. Ainsi, peu à peu, le chômeur est classé parmi les "bons" ou les "mauvais chômeurs". (5) A l’image du débat sur le développement durable, il est acceptable et éthique de s’occuper des bons déchets, …et est considéré comme un bon déchet celui qui peut être recyclé, remis dans le système pour le réalimenter.

Encore faut-il, pour pouvoir être recyclé, avoir été "cyclé" !


2. Prise de conscience: la fragilité                                        prise de conscience

La prise de conscience de la fragilité de sa situation est, pour la personne au chômage, un premier pas vers moins de souffrance et moins de culpabilité: prendre un peu de distance lui permet d’utiliser au mieux ses ressources personnelles, professionnelles et sociales afin de contribuer à sa propre réinsertion.

La fragilité ou la position «loin de l’équilibre» (6) de la personne au chômage se constate sur trois plans différents:

Sur le plan personnel

L’arrivée au chômage se traduit souvent par la honte ou au mieux par une douce euphorie mélangée d’angoisses: «Enfin une pause, et moins de pression». Mais plus les mois passent, et plus la personne au chômage prend conscience qu’elle est face à des messages contradictoires. Sous l’apparente bienveillance des travailleurs du réseau du chômage se cache une assurance paternaliste dont le discours musclé est empreint de menaces et de sanctions. Sur le plan personnel également, suivant le contexte familial, le chômeur peut être disqualifié par ses proches, ses voisins. La douce euphorie se transforme peu à peu en culpabilité, et parfois aussi en maladie. Et le ou la chômeuse ne peut sortir de cette situation que si il ou elle trouve du travail…

Sur le plan professionnel

S’il y a eu licenciement collectif, la fragilité peut être minimisée par la capacité de révolte propre à ce genre de situation, mais la personne au chômage finit par se retrouver seule face à son miroir. Quand elle est licenciée après plus de 30 ans de "boîte", et cela arrive souvent, ses compétences ont été construites pour cette entreprise dans un contexte donné. Retrouver le même travail, voire du travail est quasiment impossible. La culpabilité ressentie se double d’un sentiment d’exclusion car elle prend conscience qu’elle «ne vaut plus rien». Si elle est jeune, elle réalise que le prochain travail sera aussi fragile que le précédent, que sa vie pro­fessionnelle ne passera pas par une carrière mais par une succession de "mandats", même si, à chaque fois, elle obtient un contrat de travail de durée indéterminée: le marché, c’est le marché. Et elle sait dès lors qu’elle va vivre dans l’incertitude en permanence.

Sur le plan social

Au début du chômage, la personne au chômage est rassurée. Elle connaît certainement plusieurs personnes qui sont passées par là. Si elle fait partie d’une société locale ou d’une association, tout est pour le mieux, elle peut compter sur ce réseau. Puis, après quelques mois, elle a l’impression d’être regardée de travers, d’un air compatissant, soucieux: «…T’es encore au chômage ?». Alors s’installe en elle ce regard de l’autre, qu'elle va prendre peu à peu pour juste… Une lente descente aux enfers commence, qui la conduit à ne plus se rendre dans les magasins de son quartier ou de son village, tellement elle se sent mal. De même, elle évite d’anciens collègues, renonce à pratiquer ses loisirs préférés, tant ce qu'elle croit voir dans le regard de l’autre devient insupportable.


3. Comment s’en sortir                                                                      s'en sortir

Il arrive quelque fois que la personne au chômage s’en sorte toute seule facilement. Malgré qu’elle soit fragilisée, ses ressources, ses réseaux, ses compétences font qu’elle retrouve un emploi relativement facilement, comme par hasard… (7)

…mais le hasard est largement aidé par ce qui suit:

Des postes vacants

Aujourd’hui, il n’y a pas assez de travail pour tout le monde.

Pour un chômeur informaticien par exemple, même s’il réunit toutes les qualités profession­nelles et relationnelles demandées, il y a actuellement beaucoup trop de gens compétents sur le marché par rapport aux postes disponibles. (8)

Une envie

Avoir envie et du plaisir à travailler est un moteur très puissant.

S'il est aide-menuisier et qu’il n’aime pas travailler le bois, cela va se voir, se sentir.

Un projet

S’il n’a aucun discours sur lui-même, si sa seule ambition est de trouver du travail, s’il n’a aucun projet, même le patron le plus rétrograde le regardera de travers… Encore faut-il avoir le niveau de formation voulu pour être apte à formuler un projet.

Des compétences

Les compétences dépendent du contexte et de la personne:

- du contexte, car si la chômeuse est une excellente secrétaire et qu’elle n’a pas fait le virage informatique, cela va lui être difficile de trouver un emploi.

- d’elle-même, car si elle n’a aucun goût pour apprendre l’informatique, elle va devoir se poser la question de son choix professionnel.

Une attitude

Beaucoup se joue sur le paraître.

Il y a une poste libre: il a envie, il a un projet, des compétences, …et il refuse de mettre une cravate alors qu’il est agent d’assurances ou employé de banque. Il aura certainement moins de chance d'être engagé que celui qui en portera une.

Un réseau

La plupart des offres d’emploi qui débouchent sur un engagement ne passent pas par une annonce dans les journaux.

Apprendre à travailler et à se vendre dans un réseau est devenu indispensable.

Une stratégie

Concrètement, les personnes au chômage qui s’en sortent le mieux sont celles ayant des objectifs clairs et une stratégie adéquate. Et souvent ce sont ces gens-là qui, parce qu’une opportunité se présente, se découvrent de nouveaux enjeux, de nouvelles passions, changent d’objectifs, de stratégie s’il le faut. L’intelligence des situations, l’adaptabilité et la souplesse sont les trois compétences de base de plus en plus nécessaires à la recherche d’un emploi. (9) Le chemin est souvent plus important que la destination !

C’est pourquoi, pour augmenter ses chances de trouver un emploi malgré les difficultés, il est utile d’enrichir sa vie personnelle, professionnelle et sociale dans la mesure de ses moyens et de ses envies.


4. La personne au chômage peut améliorer sa vie personnelle               personnel

Le chômeur, la chômeuse ont des ressources:

Ses connaissances

Il peut prendre du temps pour augmenter ses connaissances, lire les journaux, écouter la radio ou regarder la télévision, surfer sur Internet. Elle a également la possibilité d'approfondir des sujets intéressants à ses yeux.

Même si le chômage est un travail à plein temps, il vaut la peine d’en "profiter" pour en savoir plus. Personnellement, pendant ma période de chômage, j’ai lu tout ce que j’ai trouvé sur l’homéopathie et la fabrication des fromages !

Son savoir-faire

Se retrouver hors du contexte professionnel permet de réfléchir à la partie cachée de sa vie: pour un homme, cela peut être prendre plaisir à faire les courses, le ménage, les repas, passer plus de temps avec les enfants. Pour une femme, cela peut au contraire révéler l'envie de rencontres, de centres d'intérêts hors de la maison.

Il ne faut pas hésiter à profiter de ces perturbations et sortir de l'ancienne routine: oser changer de rythme de vie, faire des choses qui sortent de l’ordinaire apportent une stimulation bienfaisante.

Ses ressources physiologiques

Prendre le temps de marcher dans la nature, d’aller régulièrement à la piscine ou de flâner au soleil aide dans cette période de "déséquilibre". De même, dormir davantage peut être nécessaire, en évitant toutefois le piège qui consisterait à dormir le jour et à vivre la nuit, car c’est un cercle vicieux tendant à renforcer l’exclusion et la marginalité.

Ses ressources émotionnelles

Il est utile de tenter de cerner et de comprendre les émotions qui habitent la personne au chômage: comprendre que la culpabilité provient de notre culture, et le fait qu’elle soit aussi extérieure à soi-même permet de prendre un peu de distance. (10)

Il ne faut pas hésiter à aller voir un médecin si tout devient trop compliqué, et oser lui parler des angoisses ressenties.

Sa culture

S’inscrire dans une bibliothèque, aller au cinéma, enregistrer des vidéos, écouter les musiques que l'on aime, aller au théâtre, …: la personne au chômage a besoin de loisirs.

La culture est une bonne manière de prendre de la distance et de réfléchir sur son appartenance et son identité.

Ses valeurs

Prendre conscience et faire la liste des valeurs qui sont importantes pour soi est aussi une façon de mieux se connaître et donc de mieux se situer dans des projets (p.e. identité: réputation, respect, succès, honnêteté, créativité, originalité, beauté, honneur, caractère, générosité; relation: amour, respect, honneur familial, altruisme, amitié, intelligence, éthique). (11)

Son réseau

La famille et les ami-es proches peuvent être d’un grand secours pendant ces moments difficiles. S'il y a certaines personnes avec lesquelles les liens sont un peu distendus, cette période peut être profitable pour mettre les compteurs à zéro, reprendre contact, expliquer la situation.

Se faire inviter à manger ou recevoir des gens donne la possibilité de se renforcer dans les échanges et les rencontres bienveillantes.

Ses compétences

Savoir s’adapter est d'un grand secours: le contexte et les situations complexes évoluent en effet chaque jour. Oser appuyer ses compétences personnelles sur des compétences collectives, apprendre à les organiser et à les combiner, ainsi qu'à travailler en réseau permet de faire des compétences non seulement une action mais aussi un processus. (12) Enfin, oser désobéir est aussi une compétence, car tout ce que l’on vous demande n’est pas forcément réalisable ni opportun.


5. La personne au chômage peut améliorer sa vie professionnelle     professionnel

Ses ressources

L’expérience professionnelle passée est probablement la principale ressource à utiliser par la personne au chômage: pour aller quelque part, il vaut mieux savoir d’où l’on vient.

Les ressources externes (réseaux documentaires, banques de données) lui sont disponibles par Internet ou dans des bibliothèques spécialisées. Cela permet de rester dans le coup de sa profession et d’en suivre l’évolution technique et commerciale.

La visualisation du futur — se mettre en état de projet — permet aussi de mieux imaginer dans quel genre de milieu socio-professionnel elle peut se réinsérer. Les valeurs de l’entreprise, son état d’esprit, sa culture sont proches ou éloignées des siennes. Plus elle sera en accord avec les projets et les valeurs de son futur employeur, plus un entretien d’embauche sera facilité.

Son réseau

Il existe de nombreux réseaux professionnels — à ne pas confondre avec le copinage —. Un réseau professionnel est un ensemble d’entreprises publiques ou privées qui travaillent de con­cert et proposent des valeurs et des objectifs communs et complémentaires afin d’assurer des biens et des services. Ainsi, identifier les réseaux permet de faire de meilleurs choix. Ne plus parler des «métiers du bâtiment» mais du «réseau du bâtiment» en donne une autre vision. Etre vendeuse dans un supermarché n’implique pas les mêmes compétences que de travailler dans une boutique de luxe. Le réseau personnel de relations peut être une très bonne source d’informations.

Ses compétences

Parmi les nombreuses définitions de la compétence, je retiens celle de Guy Le Boterf qui en propose une approche dynamique et situe la compétence comme "l’action au cours de laquelle sera utilisée la compétence. La compétence ne se résume donc pas à la combinaison des ressources à laquelle elle fait appel. Elle n'existe qu’en situation (ou réseau) et découle de divers processus:

- l’action passée, actualisée sous forme d’expérience,

- l’action présente, qui révèle et valide la compétence, et expérimente pour générer des compétences futures,

- l’action future, actualisée sous forme de projet.

Ainsi, la compétence n'existe que si elle a du sens pour l’individu comme pour l’organisation ou l’entreprise. Il est nécessaire d’investir la mission de l’entreprise pour en comprendre la finalité. La compétence ne pré-existe pas à un acte, elle en émerge ! Enfin, la compétence n’est pas uni­quement un acte individuel: l’émergence d’une compétence collective, dans le contexte d’une évolution technologique de plus en plus rapide et d’un marché de plus en plus tendu, est devenue une condition essentielle à la survie des entreprises (et… à la réinsertion professionnelle des chômeurs). La compétence est devenue processus."

Extrait de Le Boterf Guy, Construire les compétences individuelles et collectives, éd. d’Organisation, 2000.


6. La personne au chômage peut améliorer sa vie sociale                            social

Ses ressources

Pour avoir une vie sociale agréable malgré le chômage, il est important de participer à des activités extra-professionnelles: la vie sociale est en effet très souvent liée à la vie profession­nelle. Et ainsi perdre son emploi est fréquemment synonyme de perte de vie sociale.

Profiter du temps du chômage pour actualiser ses relations sociales: supprimer celles qui sont pénibles, en reconstruire d’autres, ou par exemple prendre plus de responsabilités dans les asso­ciations auxquelles l'on appartient déjà, tout cela participe au renforcement de l'estime de soi.

Réfléchir sur ses valeurs et sur les endroits où elles sont reconnues est un autre moyen d'amé­lioration de sa situation: si le théâtre amateur est un vieux rêve, oser faire le pas; ou si l'association de quartier semble dynamique, une première visite peut ouvrir des portes.

Son réseau

La personne au chômage habite dans une société civile. Ce réseau est un réseau citoyen. En tant que chômeur, le mot solidarité est à prendre au sérieux.

Il existe de nombreuses associations d’aide aux chômeurs, de défense des locataires, etc… Ne pas hésiter à utiliser ces réseaux dans le cadre d'une baisse de niveau de vie consécutive au chômage: qu'il s'agisse d'aider à revoir un budget, négocier avec les impôts, demander une diminution de loyer, parler de sa situation, etc…, de nombreuses personnes mettent à disposition leurs compétences au sein de ces associations.

Ses compétences

L’action passe par une prise de conscience politique (civique) et un peu de révolte — et de plus cela évite la déprime —! Prendre conscience que le monde d’aujourd’hui est une jungle permet d’acquérir les compétences pour vivre dans la jungle. Que ce soit par une attitude et une stratégie personnelles, par un regroupement des forces, "soit caméléon, soit troupeau d’éléphants…", par des actions individuelles ou collectives, la personne au chômage est la mieux placée pour s'aider elle-même… Il est possible d'apprendre à s’adapter au contexte tout comme aux situations complexes afin d'agir en conséquence.

Et de temps en temps, pour ne pas atteindre le principe de Peter, oser désobéir…


7. Employabilité et réseau                                             employabilité et réseau

L'employabilité dépend beaucoup de la capacité à transformer ses ressources en compétences dans les réseaux auxquels la personne au chômage appartient. Pour se rapprocher du marché de l’emploi, il va être nécessaire d’étudier de plus près les liens qui tissent la toile du quotidien:

sa vie personnelle

ses ressources

son réseau

ses compétences

aujourd'hui

sa vie professionnelle

ses ressources

son réseau

ses compétences

demain

sa vie sociale

ses ressources

son réseau

ses compétences

Sur les neuf liens ci-dessus faisant partie du processus de vie, trois sont fragiles, et peut-être y en a-t-il d’autres — si la personne au chômage est en plein divorce par exemple. Certains de ces liens fonctionnent mieux que d’autres, certains sont reliés entre eux.

Un premier travail consiste à les accorder pour qu’ils résonnent en harmonie comme on le ferait avec un piano ou une guitare, en étant attentif à ne pas désaccorder complètement l'instrument! Ainsi, en prenant lien après lien, il faut essayer de les sentir, de les regarder, de les écouter. Vient alors l'effort de modification des liens, les uns après les autres, lentement, afin qu’ils se rapprochent au plus près possible de ses valeurs et sentiments les plus profonds. Cette opération peut prendre du temps, des mois. De fait, cela peut être un processus en soi, un chemin sur lequel chacun marche toute sa vie.

Le deuxième travail consiste, et souvent il se fait en parallèle, à bien analyser les trois réseaux définis (personnel, professionnel, social). Il est utile de se poser les questions suivantes:

• Ces réseaux sont-ils interdépendants ?

(son ancien patron est peut-être le président de son club de foot)

• Ont-ils besoin d’être élargis ?

(le chômeur est-il trop souvent seul ?, la famille monopolise-t-elle toute l'attention ?)

• Qui est le chômeur dans ces trois réseaux ?

(est-il le même partout où il se trouve ?)

• Ces trois réseaux sont-il inclus les uns dans les autres ?

(sa vie personnelle dépend-t-elle de sa vie sociale ?)

Ainsi après réflexion, il est possible de tenter concrètement:

 d’augmenter ou de diminuer les liens qu’ils ont entre eux suivant ses désirs et ses besoins. En général, les réseaux qui fonctionnent bien ne sont ni trop ouverts ni trop fermés;

 d’élargir ceux qui en ont besoin en faisant d’autres connaissances;

 de se situer plus clairement si nécessaire en osant affirmer ses valeurs.

Le troisième travail consiste à se rendre compte que ces réseaux fonctionnent verticalement et hiérarchiquement tout en gardant leurs propres régles du jeu et leurs propres limites. Dans l’idéal, un réseau a des limites claires et garde des frontières perméables pour pouvoir communiquer avec l’extérieur. Ainsi la vie personnelle dépend de la vie familiale et sa vie familiale dépend des règles du jeu de la vie sociale… Un très bon exemple est le concubinage qui, il y a encore quelques dizaines d’années, était très mal accepté — aujourd'hui c'est le PACS !

Il est utile d'examiner également les loyautés invisibles qui traversent ces réseaux (mon choix de vie professionnelle dépend-t-il d’un événement ayant eu lieu dans ma vie personnelle ? mon attitude à l’égard de mon épouse est-t-elle influencée par ma relation à ma propre mère ? etc…).

Enfin après avoir beaucoup plus de questions que de réponses (!), il est temps de prendre les jeux qui accompagnent cette introduction et d'essayer d’y voir plus clair: ils sont fait pour cela. Mais surtout ne les prenez pas trop au sérieux. Ce sont des jeux…


8. Jeux pour personnes au chômage                                                            jeux

Ce coffret est utilisable seul, à deux ou en groupe, en famille. Il regroupe quelques jeux issus de la tradition et d’autres créés et adaptés par des passionnés de la pensée systémique: un goban, un échiquier, un charret, un génosociogramme, un appartementogramme, le GRG, le jeu du chômeur et le jeu des entretiens.

Le jeu de go

Le jeu de go est source de plaisir pour toute personne qui le pratique. Né en Chine il y a plus de 4000 ans et faisant partie des 4 arts sacrés asiatiques, le go est très pratiqué en Asie où il représente une distraction enrichissante pour des millions de joueurs.

Introduit en Europe, il jouit maintenant d’une grande réputation dans le monde occidental et son exceptionnelle richesse lui amène un public de joueurs toujours plus nombreux.

La simplicité du jeu ainsi que le regard qu'il force à avoir sur soi-même, ses faiblesses, son agressivité et autres composantes du comportement humain, en font un puissant outil de déve­lop­pe­ment personnel. Le jeu de go présenté ici est basé sur 13 x 13 lignes et s’adresse aux débutants. Il est particulièrement intéressant car il s’agit de construire des territoires plutôt que de détruire un ennemi; les règles du jeu sont simples mais la stratégie complexe; le jeu s’arrête quand il n’y a plus de coup intéressant à faire.

Règles du jeu sur  http://www.jeudego.com/

Le jeu d’échecs

Ce jeu provient probablement d'Inde, le chaturanga pourrait être son ancêtre bien que les règles en soient assez différentes. Ses traces les plus anciennes se rencontrent entre les Ve et VIIe siècles. Le jeu serait ensuite passé par la Perse vers 800 sous le nom chatrang.

Un jeu très similaire est également connu dans la civilisation chinoise, le xiangqi dont les plus anciennes traces remonteraient à 569 (il y a une controverse à ce sujet), et dont l'existence est attestée en 800 de notre ère.

Introduit en Europe par les Arabes, le jeu connaîtra une très forte popularité, en particulier auprès des classes supérieures de la société. Au XXe siècle, l'URSS en assure une promotion très active, le considérant comme un excellent outil de formation intellectuelle. Durant la guerre froide, l'apparition de Bobby Fischer, le premier occidental à défier les soviétiques au plus haut niveau, donne aux championnats du monde une véritable dimension politique. Plus tard, les tensions entre conservateurs russes et partisans de la perestroïka se cristalliseront autour de l'affrontement entre Karpov et Kasparov.

Régles du jeu sur  http://fr.freepedia.org/Jeu_d%27%C3%A9checs.html#Histoire

Le jeu du charret ou jeu du moulin

Le jeu du charret ou jeu du moulin à neuf pions est un des plus ancien jeu de plateau couram­ment pratiqué. Les plus anciens tableaux trouvés en Egypte ressemblent beaucoup à ceux que nous utilisons aujourd'hui. A partir du XIVe siècle, les Européens ont confectionné des plateaux combinés que l'on trouve encore en Allemagne, en Italie et parfois en France. Il s'agit de boîtes peu profondes comportant un couvercle. La boîte fermée, un côté servait d'échiquier, et l'autre de plateau de moulin. A l'intérieur se trouve une piste de backgammon ou un parcours de petits chevaux.

Règles du jeu sur  http://www.123jouons.com/regle.php?ID_jeu=25

Le génosociogramme (13)

"Rappelons que le génosociogramme est une sorte d'arbre généalogique fait de mémoire (c'est-à-dire sans recherche d'information et de documents) auquel on ajoute des événements de vie importants (avec leurs dates et leurs liens) et leur contexte affectif (liens sociométriques, marqués par des flèches ou des traits de couleurs). Le génosociogramme n'est pas seulement un arbre généalogique situant la parentèle. Ce qui est important, c'est la façon dont l'auteur de cet arbre "fantasmatique" perçoit les personnages tout comme les liens qui les unissent, ainsi que ceux qui le lient à ses ascendants et collatéraux et à leurs rôles. Ce sont même parfois les trous de mémoire de la famille qui en disent long (comme les silences sur le divan) sur ce qui a été "rayé de la mémoire familiale".

"Rappelons que le professeur Henri Collom a développé à Dakar (et ramené à Nice en 1978) la technique du génosociogramme, issue des réflexions de Moreno, que nous développons. "…

"Certains rattachent l'origine du génogramme à une conférence de Murray Bowen de 1967 sur la thérapie familiale; mais on pourrait dire que le génogramme est issu des premières réflexions sur les liens familiaux complexes fait par Moreno — et son atome social — sans que les divers praticiens de la thérapie familiale systémique et du génogramme retracent cette «généalogie historique»."

Extrait de Anne Ancelin Schützenberger, Aïe, mes aïeux, Desclée de Brouwer, 1999, p. 20, 21, 89.

Pour jouer, construisez votre arbre généalogique personnel et/ou professionnel et social, de mémoire, en y ajoutant les relations affectives telles que vous les ressentez. Le jeu permet de faire plusieurs génosociogrammes en même temps pour comparer différents moments de sa vie et imaginer son avenir, soit pour en construire plusieurs en parallèle, par exemple en cas de famille recomposée ou adoptive. En jouant à plusieurs, cela permet que chacun donne son point de vue sur la même situation.

              • Principaux symboles du génosociogramme:                     jeton rond  = femme

                                                                                     jeton carré  =  homme

              • Les petits bâtonnets définissant les relations sont à placer entre les personnes de
la manière qui suit (14):

Vert  =  relation normale (frontières claires)

Noir  =  relation avec peu ou sans contacts (frontières rigides)

Rouge  =  relation fusionnelle, enchevêtrée, trop proche (frontières enchevêtrées)

Bleu  =  relation autre, inconnue ou non déterminée, à découvrir

Petit bâtonnet en travers d’une relation  =  relation conflictuelle, divorce, etc…

grand-

mère

grand-

père

grand-

mère

grand-

père

ex-mari

femme

mari

ex-femme

enfant

   enfant

  enfant

enfant

zoom sur le couple

Une fois la situation posée, vous allez découvrir un certain nombre de triangles déterminés par la position des bâtonnets que vous aurez placés. Choisissez ceux qui vous paraissent les plus pertinents et posez-vous la question: quels sont les triangles qui s’influencent ? Quels sont ceux que j’aimerais voir s’améliorer, changer, et que puis-je faire pour cela ? (15)

Première variante

Commencez par les triangles périphériques, ensuite rapprochez-vous de ceux du centre. Avant de modifier une relation dans un triangle en changeant la couleur du bâtonnet, imaginez en quoi ce changement va avoir un effet sur d’autres relations, sur d’autres triangles ou sur l’ensemble. Utilisez une partie du jeu pour créer des modèles ou poser des hypothèses. Faites un zoom avant ou arrière si besoin est pour étudier un triangle de plus près ou de plus loin.

Ce jeu provoque des émotions, suggère des limites à modifier, des relations à améliorer. Prenez votre temps, allez-y lentement et soyez tendre avec vous-même, respectueux.

Deuxième variante

Une fois bien imprégné-e des principaux triangles, réfléchissez à la question de quels sont ceux qui ont le pouvoir de décision sur l’ensemble ? et quelles sont les relations à l’intérieur de ceux-ci qui prennent le contrôle sur le tout ? Par exemple, quelles influences une grand-mère a-t-elle sur votre couple ?

Essayez aussi de déterminer quelles sont les relations entre votre vie personnelle, votre vie professionnelle et votre vie sociale. En quoi le comportement de votre conseiller en placement modifie-t-il votre relation avec votre conjoint, vos enfants ?

Ce jeu peut varier à l’infini car il donne l’état provisoire d’une situation en mouvement, son organisation, sa structure et son processus, une idée du chemin sur lequel nous sommes.

L’appartementogramme

L’idée de ce jeu est née suite à un article lu concernant l’appartogramme.(16) Mais comme ce que je propose est assez différent, je l’ai nommé "appartementogramme". Le jeu comporte 8 carrés. Considérez-les comme autant de pièces de votre appartement en les regroupant selon vos surfaces existantes — n’oubliez pas la salle de bain et la cuisine !—. A l’aide des jetons ronds et carrés, des pions du jeu d’échecs, mettez chaque personne dans sa chambre, dans son lit, dans la cuisine, dans ses lieux de vie habituels, selon les consignes ci-dessous et décrivez le déroulement d’une journée sur une feuille de papier.



enfant

TV

enfant

enfant

père

mère

enfant

grand -

mère

 A l’heure du lever:

  qui occupe quelle pièce ? Suis-je satisfait-e de cette disposition ? Qu’aurait-il lieu de modifier ?

 A l’heure du repas de midi:

  qui occupe quelle pièce ? Suis-je satisfait-e de cette disposition ? Qu’aurait-il lieu de modifier ?

 A l’heure du repas du soir:

  qui occupe quelle pièce ? Suis-je satisfait-e de cette disposition ? Qu’aurait-il lieu de modifier ?

 A l’heure du journal télévisé:

  qui occupe quelle pièce ? Suis-je satisfait-e de cette disposition ? Qu’aurait-il lieu de modifier ?

 A l’heure du coucher:

  qui occupe quelle pièce ? Suis-je satisfait-e de cette disposition ? Qu’aurait-il lieu de modifier ?

 Au milieu de la nuit:

  qui occupe quelle pièce ? Suis-je satisfait-e de cette disposition ? Qu’aurait-il lieu de modifier ?

Faites un résumé des principaux problèmes rencontrés. Si la liste est longue et quelque peu angoissante, faites une pause, «passer votre tour». Quand vous revenez jouer, essayez de classer les difficultés rencontrées par ordre d’importance. Par exemple, la TV est-elle devenue omni­présente, empêche-t-elle la discussion que je voudrais avoir avec mon fils, ma fille, mon mari, mon épouse ? Cette question est-elle urgente ?…

Une fois la liste établie, le jeu consiste à ne pas chercher de solution mais à déplacer des objets, puis des personnes, puis des intervalles de temps.

Pour déplacer des objets:

Pour cela, prenez des petits objets qui vous entourent (crayon, ficelle, agrafe, jouets, bibelots) et/ou les pièces des autres jeux. Donnez un nom à chacun et placez-les dans votre apparte­mentogramme dans leur position réelle. Si un jouet devient la TV, mettez-le à sa place. Si vous avez quatre TV, prenez 4 jouets… Ensuite déplacez ou supprimez certains objets et imaginez ce qu'il va se passer — si vous mettez la TV à la cave, que va-t-il se produire ? —.

Essayez simplement de changer de place ou de supprimer un objet. Tentez d’en visualiser les conséquences. Quand vous estimez avoir suffisamment bougé ou supprimé de choses, refaites la liste des problèmes que vous aviez posée et regardez en quoi elle s’est modifiée.

Pour déplacer des personnes et des intervalles de temps:

Faites la même démarche que précédemment avec les personnes. Si par exemple l’un des conjoints dort au salon, ou si votre enfant vient vous réveiller chaque nuit à la même heure, déplacez le problème en changeant de chambre, en changeant les heures du coucher ou en inventant d’autres limites. Si les repas sont difficiles, essayez de changer les places habituelles, de changer les heures des repas, de manger entre adultes parfois et de laisser les enfants manger seuls ou l’inverse.

L’idée est d’introduire dans le quotidien de la souplesse, de l’imagination, de la surprise et surtout du jeu… Refaites ensuite la liste des problèmes que vous aviez posée.

En fonction des réponses que vous avez maintenant, laissez passer du temps. Le but de ce jeu n’est pas de résoudre des problèmes mais de modifier la manière de les poser. (17)

Le grg (18)

Ce jeu ne comporte qu’une seule règle: il se joue en silence. Il n’y en a pas d’autres, si ce n’est celles inventées par le ou les joueurs. Ce jeu a été créé pour faire des constructions mentales, jouer des situations, faire des sculptures. Le tout devient peu à peu miroir, instrument synchronique.

Personnellement, je l’utilise avec mon épouse de la manière qui suit:

nous avons récolté une centaine de petits cailloux, et notre règle est ainsi: chacun de nous met une pierre chaque jour alternativement sur le jeu. La place est choisie en fonction de son état mental du moment, et de la volonté de contribuer à faire une belle sculpture, une belle forme. Nous nous imposons aussi de ne pas parler du jeu en cours. Chaque jour apparaissent de nouvelles formes, de nouvelles relations, de nouvelles émotions à l’image de notre histoire de vie. Le jeu s’arrête par consentement mutuel.

Le jeu du chômeur

Pour tenter de vous aider à construire votre vie professionnelle, procédez comme suit: construisez votre situation présente sur le premier carré, et construisez par exemple sur le huitième carré votre situation dans trois ans comme si vous aviez une baguette magique. Ensuite imaginez concrètement votre future situation, visualisez-la, ressentez-la; utilisez vos cinq sens pour cela.

Alors patiemment, remplissez le deuxième carré, le troisième, etc… Mettez en place une stratégie pour atteindre ce huitième carré, et définissez des intervalles de temps. Par exemple, le premier carré vaut 6 mois, le deuxième 8, etc… Après avoir construit le septième carré, réfléchissez bien: le huitième est-il toujours aussi pertinent ou doit-il être modifié ? Si vous le modifiez, en quoi a-t-il une influence sur les 7 premiers ? Modifiez le tout de manière à ce que que les 8 carrés soient en accord avec votre projet et que la stratégie soit cohérente. Refaites le jeu un mois plus tard. En quoi est-il différent ?

L’idée principale de ce jeu n’est pas de vouloir retourner à un état précédent le chômage, mais bien d’utiliser ce que vous êtes ici et maintenant pour construire votre réalité de demain.



le grand-

chef

notre

chef

ma collègue

moi

mon

métier

mes

ressources

mes

compétences

mon

réseau

moi

collègue

collègue

mon

métier

mes

ressources

mes com- pétences

Le jeu des entretiens

Imaginez l’entretien ci-dessous en superposant votre propre situation à celle décrite. Et posez-vous les questions suivantes:

Quel est mon projet professionnel — quelles sont mes envies? mes compétences ? celles qui me manquent ?, à quel métier cela correspond-t-il ?, quelle stratégie de formation mettre en place ?, est-ce réalisable dans un temps raisonnable ? — ?

Personnages: A représentant de l’institution, C chômeuse

Première scène

A: Bonjour, comment allez-vous ?

C: Bonjour, cela pourrait aller mieux.

A: Mieux ?

C: Vous savez…

A: Je sais, c’est triste… Vous avez vu la catastrophe à la TV hier soir ?

     C’est un vrai labyrinthe chez nous, vous avez fini par trouver mon bureau ?

C: Pas facile à trouver ! Me suis perdue deux fois…

A: Oui je sais, mais cela me permet d’avoir un bureau tranquille ! (rires) Où en êtes vous ?

C: Le chômage me rend malade…

A: Malade ? Cela vous fait mal où ?

C: J’ai des insomnies et excusez-moi de vous le dire, des problèmes intestinaux. Une boule à l’estomac…

A: Vous êtes allée voir votre médecin ?

C: Non

A: Pourquoi ?

C: J’ai pas l’argent pour payer ma part… et j’ai du retard dans le paiement de mon assurance maladie.

A: Vous avez refait votre budget depuis que vous êtes au chômage ?

C: Non, je sais que je gagne 20% de moins et de toute façon, je ne m’en sors pas.

A: Je comprends ça. J’ai aussi fait plus d’une année de chômage. Je suis comme vous, je déteste les factures !

C: C’est pas tellement les factures que le fait que je peux pas les payer. Et la garderie coûte cher.

A: Vous avez combien d’enfants ?

C: Deux, 3 et 8 ans.

A: Deux filles ?

C: Non, deux garçons.

A: Et que pense votre fils de 8 ans de votre situation ?

C: Mon fils est content car je peux manger avec lui à midi.

A: Et votre mari, comment voit-il les choses ?

C: Avec mon mari, vous savez, on ne parle pas de cela. Il souhaite que je retravaille le plus vite possible.

A: Vos parents habitent près de chez vous ?

C: Non, ils sont retournés au Portugal, mais j’ai ma sœur…

A: Votre sœur ?

C: Oui, elle est aussi au chômage, elle travaillait dans la même entreprise que moi.

     Et dire que les actions de cette entreprise ont encore augmenté, je ne comprends plus rien.

A: Que pense votre sœur de votre ancien employeur ?

C: Elle est révoltée. Dire que notre patron a encore été augmenté depuis la restructuration…

A: Vous avez des nouvelles par d’anciennes collègues ?

C: Oui, on se voit le samedi matin.

A: J’ai vu un reportage à la TV sur votre entreprise la semaine passée, vous aussi ?

C: Oui et mes collèges n’en peuvent plus. Y a trop de pression.

A: (rires) Vos collègues en colère sur l’écran, c’est fort !

C:(sourire) Oui, je me sens moins seule.

A: Ok j’aimerais parler avec vous de vos éventuels projets.

C: Je cherche du travail.

Scène 2

A: Vous avez des projets ?

C: C’est quoi un projet ? Moi du moment que je peux ramener 3000.- fr. à la maison…

A: Votre projet, votre envie, vos compétences,… je sais, vous devez gagner votre vie pour boucler les fins de mois.

C: Oui et peu importe le travail, moi ce qu’il me faut c’est du travail.

A: Ok. Je vais plaisanter un peu mais si vous aviez une baguette magique, (19) que feriez-vous ?

C: Une vraie baguette ?

A: Oui une qui vous permette tout tout de suite… d’un coup…

C: Je prendrais des vacances toute seule avec mon mari.

A: Il aurait envie de ça ?

C: Avant la naissance des enfants, oui.

A: Avant ?

C: Des fois, je regrette.

A: Regrettez quoi ?

C: D’avoir fait des enfants… on est jamais seul avec mon mari.

     Et sans les enfants, le chômage serait plus facile. Je dois prouver que je suis disponible pour travailler. J’ai dû me battre pendant deux ans pour trouver une garderie…

A: Et votre sœur, que dit-t-elle ?

C: Ma sœur a envie de retourner au Portugal, cela va pas si mal là-bas.

A: Et vous à quoi rêvez-vous ?

C: Je rêve d’autre chose…

A: …… silence ……

C: J’aime la couture…

A: Vous dessinez aussi ?

C: Oui, j’avais fait un début d’école de stylisme avant de tomber enceinte.

A: Vous aimez la mode ?

C: Moins la mode que la création d’habits. J’aime porter des habits que je suis seule à porter.

A: Votre veste rouge, c’est vous ?

C: Oui c’est moi.

A: Elle vous va bien (silence admiratif) !

     Avec votre baguette magique, si vous deviez vous imaginer dans trois ans, dans quelle genre de situation aimeriez-vous vous trouver ?

C: J’aimerais rester en Suisse car mes enfants y sont nés… Le français est leur langue maternelle.

A: Comment imaginez-vous votre appartement dans trois ans ?

C: Avec une pièce de plus car je suis enceinte.

A: De combien de mois ?

C: Quatre

A: Vous vivez cela comment ?

C: Bien, j’aime les grandes familles.

A: Et votre mari ?

C: Bien, il est content et ses parents aussi.

A: Ses parents aussi ?

C: Oui ses parents habitent à Lausanne. Ils prennent leur rôle de grands-parents très au sérieux.

A: Et comment les grands-parents ressentent-ils la situation ?

C: Ils aimeraient avoir les enfants plus souvent.

A: Si je comprends bien, vous aimeriez faire une pause.

C: Oui et non

A: (avec humour) Oui… et non…

C: Non car le chômage impose ses règles et plus vite j’en serai sortie, mieux ça vaudra, oui car partir deux semaines avec mon mari me ferait du bien et c’est bientôt le mois de juillet.

A: Comment pourriez-vous utiliser le chômage pour construire votre avenir ?

C: J’aimerais retrouver mon métier de couturière.

A: Vous savez aussi bien que moi qu’il y a peu d’avenir dans ce métier.

C: Oui je sais, mais je suis douée, j’aime ça et j’aimerais me mettre à mon compte…

A: A mon avis, c’est un pari un peu impossible.

C: Vous croyez ? Vous ne pouvez pas m’aider ?

A: Vous aider non, vous donner des pistes oui. Vous avez aussi mal à la tête ?

C: Non que des insomnies… et des problèmes intestinaux.

A: Ok, je vais vous proposer un jeu:

C: Un jeu ?

A: Oui de réfléchir trois nuits de suite pendant vos insomnies.

Scène 3

C: Réfléchir pendant mes insomnies ?

A: Tant qu’à faire, vous pourriez utiliser vos insomnies intelligemment plutôt que de compter les moutons (rires).

C: C’est vrai mais j’aime les moutons (rires), j’ai été élevée chez mes grands-parents.

     Ils avaient 150 moutons.

A: Wow…

     Et si vous tentiez d’habiller chaque mouton que vous comptez…? (rires) (20)

     Je vous propose de devenir styliste pour moutons !! Et je vous ferais un certificat avec mon ordinateur.

C: Non, c’est pas sérieux, je suis au chômage.

A: (sérieux) La nuit vous n’êtes pas au chômage.

C: (rires) Et je vais faire des habits pour les moutons pendant que mon mari ronfle à côté de moi et que je suis enceinte…

A: Vous avez raison, c’est trop difficile.

C: Tant qu’à faire, je veux bien essayer.

A: Vous aimez aussi le bleu ?

C: Oui mais ma couleur préférée c'est le vert.

A: Comment pourriez-vous habiller vos moutons ?

C: Je vais réfléchir…

A: Et cela ferait plaisir à vos grands-parents.

C: Oui mais ma grand-mère tricotait toute la journée, cela m’énervait…

A: A qui cela ferait-il le plus plaisir que vous deveniez styliste ?

C: Probablement à mon mari, il aime quand je suis heureuse.

A: Donnez-vous le droit de rêver pendant vos insomnies.

C: Oui je veux bien essayer si je n’ai pas de maux de ventre.

A: Commencez par occuper vos insomnies, les maux de ventre, je ne peux rien faire…

C: Ok, je vais essayer.

Scène 4

A: Racontez moi, que savez-vous faire en couture ?

C: J’adore créer des vêtements et faire des retouches. Dernièrement, j’ai fait un veston pour mon beau-frère. Il était impressionné mais comme il a un petit ventre, j’ai dû reprendre les plis croisés.

A: Vous aimez réparer ?

C: Oui quand quelqu'un est mal foutu, j’aime bien lui faire un vêtement qui le mette en valeur. (rires)

A: Vous aimez les choses esthétiques.

C: Oui, j’aime la peinture.

A: Moderne.

C: Oui et Non, Picasso particulièrement.

A: Son style ?

C: J’aime les belles lignes.

A: C’est quoi pour vous une belle ligne ?

C: Vous connaissez Miro et Mondrian ?

A: Un peu…

C: J’aime les peintres qui ont créé des ruptures dans l’histoire de la peinture.

A: Vous aimez les ruptures ?

C: Pas dans ma vie, le chômage en est une. Mais je connais mes compétences.

A: Mais vous savez, les compétences dépendent du contexte et de la demande.

C: Du contexte ?

A: Oui, si vous êtes un informaticien doué dans les anciennes technologies, ben sur le marché actuel vos compétences ne valent plus rien.

C: Oui je sais, je dois apprendre la couture et le stylisme par informatique…?

A: Cela vous paraît trop difficile ?

C: Non, mais un peu moins créatif.

A: Etes-vous prête à faire ce compromis ?

C: Oui si par la suite, je peux me mettre à mon compte.

Scène 5

A: De quoi auriez-vous besoin pour réaliser votre projet ?

C: D’avoir du temps pour dessiner.

A: Du temps ?

C: Je suis trop préoccupée.

A: Votre budget ?

C: Oui mon budget.

A: Je peux vous faire une proposition ?

C: Oui allez-y.

A: Partez 10 jours avec votre mari.

C: Et les enfants ?

A: Confiez-les à votre sœur ou à vos beaux-parents…

C: Et ?

A: Consacrez deux heures de vos vacances avec votre mari à refaire votre budget, à étaler vos factures. Vous savez aujourd’hui, tout se négocie…

C: J’ai envie de vacances…

A: Alors parlez budget le soir avant de partir en vacances.

C: Ok je vais réfléchir…

A: Vous connaissez les écoles de stylisme ? Et les stages dans le cadre du chômage ? (21)

C: Non pas vraiment.

A: Après vos vacances, je vous montrerai la liste, je vous expliquerai…

A: Votre grossesse se passe-t-elle bien ?

C: Oui super bien. Quand je suis enceinte, je suis pleine de vie.

A: Vous faites plaisir à voir…

C: Merci.

Scène 6

A: A quoi pensez-vous?

C: Je sais pas trop mais tout ça me fait réfléchir.

A: Réfléchir ?

C: Non pas vraiment, mais je m’imagine habiller mes moutons. (rires)

A: Faites-leur des beaux habits.

C: Oui j'ai envie…

A: En plus vous savez le faire.

C: Oui je sais mais je rêve un peu.

A: Oui mais la nuit vous n’êtes pas au chômage.

C: Oui j’ai compris.

A: Vous avez droit encore à des jours de vacances ?

C: Il me reste 20 jours sans contrôle à prendre sur mon chômage.

A: Partez en vacances et refaites votre budget.

C: (elle pense à ses enfants) Oui trois jours chez ma sœur et une semaine chez les grands-parents, cela doit être possible…

A: Je vous prépare la liste des écoles de stylisme, ok ? et les démarches pour se mettre à son compte. Et les stages possibles.

C: Oui je me sens mieux.

A: Dans un mois, après vos vacances, le prochain rendez-vous ?

C: Oui, je vous apporterai des croquis.

A: Je veux des beaux moutons !

     A bientôt, c’est une fille ou un garçon ?

C: Au revoir, je ne sais pas mais j’aimerais une fille…

Imaginez l’entretien ci-dessous en superposant votre propre situation à celle décrite. Et posez-vous les questions suivantes:

Qu’est qui m’empêche d’être apte au placement — est-ce que mon travail au noir se justifie ?, est-ce une question d’argent ?, y a-t-il des pressions de ma famille (conjoint, enfants, etc…) ?, suis-je bien dans ma tête ?, devrais-je aller voir un médecin ?, que faire avec ma culpabilité ?, je me sens exclu et mal dans ma peau, que faire ?, ne vaudrait-il pas mieux que j’en parle à quelqu’un ?, quelle stratégie mettre en place pour sortir du chômage ? — ?

Personnages: A représentant de l’institution, C chômeur

Scène 1

A: Bonjour

C: Bonjour

A: Prenez place.

     Qu’est-ce qui vous amène ?

C: Je ne sais pas, on m’a convoqué.

A: Ok. Je vous ai convoqué à la demande de votre conseiller en placement à l’ORP.

C: Je sais.

A: Et que pense votre ORP ?

C: Je ne sais pas.

A: Vous ne savez pas ?

C: Non

A: Vous êtes marié ?

C: Oui

A: Votre femme pense quoi ?

C: Je suis marocain et elle aime pas ça.

A: Ca, que vous soyiez au chômage ?

C: Oui

A: Cela vous blesse comme homme ?

C: Oui ma femme me fait des remarques et je ne supporte pas, je deviens violent.

A: Quelles genres de remarques ?

C: Que c’est ma faute si je trouve pas de travail. Que je dois faire un effort.

A: Violent ?

C: Elle ne doit pas. Elle n’a pas le droit.

     C’est moi l’homme.

A: Elle vous appartient ?

C: Oui

A: Ok, je comprends, vous avez envie d’être respecté. Vous avez des frères et sœurs ?

C: Oui, quatre.

A: Ils vous donnent des conseils ?

C: Surtout mes sœurs.

A: Elles pensent la même chose ?

C: Non une m’engueule, l’autre me calme.

A: Vous savez pourquoi, vous êtes ici ?

C: Non

Scène 2

A: Je m’occupe d’organiser des emplois subventionnés pour les chômeurs. Votre conseiller en placement souhaite que vous fassiez un stage.

C: Un stage ?

A: Oui. Que vous acceptiez de travailler avec nous pendant deux mois…

C: Pourquoi ?

A: Vous êtes soupçonné de travailler au noir…

C: …… silence ……

A: C’est quoi votre métier ?

C: Je travaille comme aide-peintre.

A: Vous savez comment fonctionne l’assurance-chômage ?

C: Non

A: Vous savez ce que c’est qu'une assurance ?

C: Oui

     Si je ne travaille pas, je suis mal.

A: Je vous propose de travailler avec nous.

C: Cela implique quoi ?

A: Que vous devez respecter les horaires, travailler avec les autres peintres pendant deux mois.

C: …… silence ……

A: Nous avons un atelier de peinture, il faudra aller vous présenter.

C: …… silence ……

Scène 3

A: Ok. A quoi pensez-vous ?

C: C’est la merde.

A: C’est quoi votre formation ?

C: Je n’en ai pas. Je sais un peu tout faire…

A: A moi personnellement, ça m’est égal si vous travaillez au noir.

C: Ah oui ?

A: Des fois, on ne peut pas faire autrement, mais on prend des risques.

     Par contre, je dois vous faire bosser, ou vous devez retourner discuter à l’ORP.

C: Si je refuse, que va-t-il se passer ?

A: Je ne connais pas la loi par cœur mais vous allez être sanctionné.

C: Je sais, je connais ça.

A: Vaudrait pas mieux sortir de ce cercle vicieux ?

C: Comprends pas.

A: Si vous bossez au noir, vous aurez des ennuis avec l’ORP, si vous ne bossez pas, des ennuis avec votre femme… (rires)

     Je vous propose un travail légal…

C: …… silence ……

A: …… silence ……

C: …… silence ……

A: Vous avez un ordinateur à la maison ?

     Vous avez droit à des cours d’informatique si vous faites un stage chez nous.

     Dites à votre femme que vous allez faire une formation dans le cadre du chômage…

C: …… silence ……

     Je ne sais pas lire et écrire…

A: Ok. De quoi avez-vous envie ?

C: De plus être dans la merde.

A: Je comprends ça.

C: Je ne supporte plus…

A: Vous devez faire plaisir à trop de gens à la fois…

C: Oui

A: Pourriez-vous déplaire à une de vos sœurs ?

C: Non

A: Celle qui vous calme…

     Vous aimeriez apprendre à lire ?

C: J’y pense souvent…

A: Souvent ?

C: Cela me permettrait de me faire respecter…

A: Et si vous appreniez à lire et à écrire et que vous le fassiez vraiment ?

C: Cela vous paraît possible ?

A: Pour cela, je dois discuter avec votre ORP.

A   Vous seriez prêt à faire deux mois de cours intensifs à mi-temps et de travailler l’autre mi-temps chez nous ?

C: Oui

A: Vous savez que c’est pas facile ?

C: Je sais.

Scène 4

A: Ok, j’écris à votre ORP dans ce sens. Je vais vous lire le mail avant de l’envoyer.

C: Je ne vais pas être sanctionné ?

A: (ne répond pas mais lit à mesure qu’il écrit)

     Madame, je viens de recevoir Monsieur X. Après avoir parlé avec lui, il apparaît que Monsieur X ne sait ni lire ni écrire. De mon point de vue, en parallèle à un emploi subventionné, le mieux serait de lui proposer des cours intensifs d’alphabétisation l’autre mi-temps. Cela permettrait de le valoriser auprès de sa famille et de lui offrir une meilleure intégration professionnelle. Monsieur X est prêt à entamer cette démarche. Meilleures salutations…

C: Vous allez envoyer ça ?

A: Pourquoi pas ?

C: Je vais devoir avoir envie !

A: Tant que vous êtes coincé entre votre famille et le travail, vous n’aurez aucune envie ! (rires)

C: Faut que j’en parle à ma mère…

A: Cela est important pour vous ?

C: Oui

A: Dites-lui que vous avez une chance unique d’apprendre à lire et à écrire.

A: Votre femme sait lire ?

C: Oui, elle est aide-infirmière.

A: Pour vous faire respecter, il va falloir vous mettre à son niveau et renoncer à la violence…

     Et accepter de mettre votre fierté au vestiaire pour quelque temps…

C: Oui

A: L’envie dépend beaucoup de la situation dans laquelle on est.

C: Ok je vais réfléchir.

A: Retournez discuter avec votre ORP la semaine prochaine, les décisions doivent être prises entre eux et vous.

     J’envoie le mail.

C: Je ne vais pas être sanctionné ?

A: Non, C’est moi qui propose que vous preniez des cours d’alphabétisation en plus d’un emploi subventionné et… vous êtes d’accord !

C: Ok, Merci.

A: A mon avis, il vaut mieux prendre des cours de français que de travailler au noir pour faire plaisir à sa famille. Vous en serez d’autant plus respecté par les uns et par les autres.

C: Je suis très fâché contre ma femme.

A: Et moi contre vous ! (rires)

C: …… rires et silence ……

A: Bon, On y va comme ça ?

C: Oui, je l’aime.

A: A bientôt, bonne journée !

C: Bonne journée !

Imaginez l’entretien ci-dessous en superposant votre propre situation à celle décrite. Et posez-vous les questions suivantes:

Quelles sont mes compétences de base  — quelles sont celles que j’aime le mieux ?, quelles sont celles à acquérir pour me rapprocher du marché du travail ?, comment modifier ma situation professionnelle ?, quelle stratégie utiliser ? — ?

Personnages: A représentant de l’institution, C chômeur

Scène 1

A: Bonjour Monsieur

C: Bonjour

A: Vous avez trouvé facilement ?

C: Vous m’aviez bien expliqué au téléphone.

A: Beaucoup de gens se trompent, c’est un vrai labyrinthe ici.

C: Mais je me rappelle toujours les détails… Et j’ai bonne mémoire.

     Je suis informaticien

A: Ah oui c’est vrai, vous êtes spécialisé ?

C: Oui, dans la création de logiciels…

A: Vous êtes au chômage depuis longtemps ?

C: Depuis près de deux ans, voici mon CV.

A: (lisant) Votre CV est impressionnant !

C: Oui, mais ce métier a considérablement évolué.

A: Vous savez qu’il y a beaucoup trop de gens comme vous sur le marché ?

C: Je sais, et j’aimerais m’orienter dans la maintenance de réseaux.

A: Quelle genre de réseau ?

C: Dans la téléphonie.

A: Vous êtes marié ?

C: Non, divorcé et je vis avec ma nouvelle compagne.

A: Que pense-t-elle de la situation ?

C: Heureusement, elle gagne bien sa vie…

A: Vous parlez avec elle de votre chômage ?

C: Oui, elle me soutient beaucoup, j’ai parfois des coups de blues…

A: C’est fréquent ces coups de blues ?

C: Plus les mois passent, oui…

A: Comment cela se passe quand vous n’avez pas le moral ?

C: (rires) Je passe deux jours sur mon ordinateur… et je suis insupportable !

Scène 2

A: Que faites-vous sur votre ordinateur ?

C: Je crée des jeux de stratégie pour PC.

A: Quel genre de jeux ?

C: Je m’imagine comme personnage principal devant des montagnes à renverser…

A: (rires) Le mythe de Sisyphe ?

C: Non, j’ai inventé une machine à détruire les montagnes et comme ça je peux passer au travers…

A: Et vous voulez acquérir des compétences dans les réseaux informatiques…

C: Je n’ai pas le choix

A: (ironique) Et vous trouvez que vous êtes un bon stratège ?

C: Je ne comprends pas, vous vous moquez de moi ?

A: Non, je m’amuse du fait que vous avez une passion, des compétences et que vous voulez en changer.

     La raison contre la passion !

C: (sourire)

A: La stratégie vous intéresse-t-elle vraiment ?

C: Oui. Par exemple, je me suis mis au jeu de go.

A: Génial, je joue parfois mais ne suis pas un très bon joueur !

     Si vous aviez le choix, comment souhaiteriez-vous construire votre avenir ?

C: D’abord, je dois travailler pour payer ma pension alimentaire.

A: …Vous avez des enfants ?

C: Oui, deux, un fait son bac, l’autre est en lettres.

A: Une fille, un garçon ?

C: Oui

A: Et que pensent-ils de leur père chômeur ?

C: Ils ne sont pas inquiets, ils sont sûrs que je vais m’en sortir bientôt.

Scène 3

A: Vous avez déjà fait des offres dans des entreprises de création de jeux vidéos ?

C: Non

A: Vous seriez d’accord d’améliorer votre dossier de présentation ?

C: Je ne comprends pas !

A: Je m’explique: vous pourriez faire un emploi subventionné chez nous dans la création de jeux vidéo en 3D, tout en prenant des cours de maintenance de réseau…

C: C’est possible ?

A: Oui, vous avez des compétences réelles et déjà un métier.

     On pourrait faire 3 mois et 3 mois, 3 mois de formation sur les réseaux, en même temps qu’une expérience de créateur de jeux vidéo, cela paraît jouable vue votre formation, et trois mois par la suite de pratique professionnelle de maintenance de réseaux. Et nous ferions le point tous les mois, ensemble. Après 6 mois, la situation sera plus facile à décanter…

C: …… silence ……

A: L’informatique c’est mieux que ce soit une vraie envie. Cela vous donne un peu de temps…

C: C’est beaucoup à la fois !

A: En plus, peu à peu, vous allez devoir étudier le marché, retrouver d’anciens collègues, travailler votre réseau. Là, vous aurez besoin de votre machine à détruire les montagnes !

     Ou en tous les cas pour les contourner… (sourire)

C: Oui, je vais avoir besoin de refaire mon dossier.

A: Oui, Un CV ne suffit pas, vous êtes un homme de projet !

C: J’ai plein d’envies mais le chômage me pèse trop.

A: A votre prochain coup de blues, seriez-vous d’accord d’essayer de faire un jeu qui contourne les obstacles plutôt que de tenter de les détruire ?

C: Je n’avais jamais pensé à ça…

A: Vous voyez quand votre ORP ?

C: Dans une semaine.

A: Parlez de notre discussion et réfléchissez à ma proposition.

C: Ok.

A: A bientôt !

Imaginez l’entretien ci-dessous en superposant votre propre situation à celle décrite. Et posez-vous les questions suivantes:

Comment fonctionne le réseau du chômage — la position de mes deux interlocuteurs est-elle la même ?, pourquoi cet entretien a-t-il lieu ? — ?

Personnages: A représentant de l’ORP, B maître socio-professionnel, C chômeuse

Scène 1

A: Bonjour, merci de m’avoir invité sur votre lieu de travail.

B: Bonjour

C: Bonjour

A: Vous avez fait vos recherches d’emploi ?

B: (l’interrompant) Avant de parler des recherches d’emploi de Monsieur C, j’aimerais vous situer le contexte dans lequel nous avons travaillé avec M. C. Vous prenez un café ?

A: Oui volontiers

B: Et vous ?

C: Avec plaisir

(pause)

B: J’aimerais vous remercier d’avoir demandé à nous rencontrer d’autant plus que Monsieur C va bientôt finir son stage. Monsieur C, pouvez-nous retracer les principales étapes de ces six derniers mois ?

A: Oui, mais…

B: Oui, Monsieur C, dites-nous, racontez-nous.

C: Voilà, Il y a six mois, j’étais dans un triste état mais les choses ont beaucoup changé.

A: Dans quel sens Monsieur C ?

C: J’étais au fond du trou quand vous m’avez demandé de faire un ETS. Aujourd’hui, j’ai repris confiance en moi, j’ai revisité toutes mes bases de comptabilité et je me suis initié au logiciel Cresus.

B: A quel moment avez-vous repris confiance ?

C: Environ après 3 semaines, quand j’ai commencé à comprendre…

B: (s’adressant à A) De votre côté, comment voyez-vous la situation ?

A: Merci pour le café ! Comme représentant de l’assurance-chômage, j’aimerais connaître dans le détail comment a évolué la situation. Monsieur C sera en fin de droit dans 3 mois et il n’a toujours pas trouvé de travail. Je pense qu’il en est un peu responsable… C’est pourquoi j’aimerais que nous regardions ses offres d’emploi du mois ensemble.

B: Je propose que nous parlions des offres d’emploi de Monsieur C en fin d’entretien.
Monsieur C, vous aviez compris quoi après 3 semaines chez nous ?

C: J’ai compris que j’existais. Cela va vous paraître bizarre mais le chômage, de fait, nous fait comprendre, plus les mois passent, que si l’on ne retrouve pas de travail, c’est de notre faute, de notre responsabilité. Après 3 semaines de stage, j’ai compris cela. Mon sentiment d’exclusion, de SDF du travail mettait en cause mon identité et c’est pour cela que j’allais si mal. J’ai compris enfin que notre système économique avait besoin de nous, chômeurs, pour maintenir son équilibre et sa survie. Dès ce moment-là, j’ai pu commencer à travailler et à me reconstruire.

Scène 2

A: vous reconstruire ?

C: Oui me reconstruire. J’ai fait un cours d’expression théâtrale, entre autre et je me suis senti revivre. Aujourd’hui, j’ai refait mon CV, j’ai des projets. Je suis d’accord, il reste à les réaliser.

B: Des projets concrets, racontez-nous…

C: Mes compétences de base ayant été mises à jour, je me suis pris de passion pour la fiscalité et la loi sur les impôts.

A: Et ?

C: J’ai enfin un projet professionnel qui tient la route. Je suis en train d’étudier tout le réseau qui gravite autour des impôts.

B: Vous veniez de vous séparer en arrivant ici ?

C: Et j’ai aussi compris pourquoi, je suis vraiment con des fois !

B: (en riant et s’adressant à A) Il vient de trouver une nouvelle copine !

A: Elle fait quoi votre copine ?

C: Elle est policière, elle est super !

B: Elle pense quoi de la situation ?

Scène 3

C: Je lui ai dit que je faisais un stage mais pas que j’étais au chômage.

B: Dans combien de temps vous allez le lui dire ?

C: Je ne sais pas…

B: Imaginez que je suis votre copine et essayez de me dire que vous êtes au chômage.

C: (s’embrouille) Euh, oui, non je, non, je ne peux pas.

B: Ok, Imaginez que je suis votre copine et parlez-moi de vos projets.

C: Ca, c’est facile !

B: (s’adressant à A) Monsieur C a de la peine avec sa culpabilité. Pensez-vous que c’est un handicap à sa recherche d’emploi ?

A: Monsieur C, comment se manifeste votre culpabilité ?

C: Je me mets à transpirer et je me sens mal.

B: Transpirer ?

A: Vous ne pouvez pas faire un effort ?

C: C’est pas contrôlable !

B: Ok (s’adressant à A) Vous savez, Monsieur C a déjà fait d’énormes progrès. En arrivant ici, il rasait les murs (rires). L’humour est une bonne manière d’apprivoiser sa culpabilité ! Quand il se sent coupable, j’ai pris l’habitude de lui dire d’un ton humoristique «On sait tous que c’est votre faute, si vous êtes au chômage». Il va finir par le croire ! (rires)

A: (rires) je vois…

C: C’est pas drôle. (rires)

A: Je suis surchargé et je dois malheureusement m’en aller. Monsieur C, je vous propose de parler de vos offres d’emploi à notre prochain rendez-vous.

B: Et de ses projets. Merci d’être venu, à bientôt.

A: Au revoir, merci !


9.Bibliographie                                                                            bibliographie

1.        Amiguet Olivier et Julier Claude (sous la direction de), Travail social et systémique, éd. IES, 1994

2.        Satir Virginia, Thérapie du couple et de la famille, éd. Desclee de Brouwer, 1995

3.        Capra Fritjof, La toile de la vie, éd. du Rocher, 2003

4.        Conférence de Spagnolo A., Observatoire Romand et Tessinois de l’Emploi, 2004

5.        Duvanel Blaise, La Suisse et ses chômeurs, éd. IES, 2002

6.        Prigogine Ilya, Stengers Isabelle, Les lois du chaos, éd. Flammarion, 1977

7.        Watzalawick Paul, Les cheveux du baron de Münchhausen, éd. Seuil, 1991

8.        Enquête sur la situation du secteur informatique vaudois et genevois - Miano Marielle - OMT VD - mars 2004

9.        Le Boterf Guy, Construire les compétences individuelles et collectives, éd. d’Organisation, 2000

10.     Elkaim Mony (sous la direction de), Panorama des thérapies familiales, éd. Seuil, 1995

11.     Cudicio Catherine, Comprendre la PNL, éd. d’Organisation, 1996

12.     Le Boterf Guy, Ingénierie et évaluation des compétences, éd. d’Organisation, 2002

13.     Schützenberger Anne Ancelin,  Aïe, mes aïeux, Desclée de Brouwer, 1999

14.     Minuchin Salvador, Familles en thérapie, éd. ERES, 1988

15.     Bowen Murray, La différenciation du soi. Les triangles et les systèmes émotifs familiaux, éd. ESF, 1984

16.     Chevrier A., Un exemple d'appartogramme, Référence Neuropsychiatrie de l'Enfance, 1992, 40, 10, 505-510

17.     Watzlawick/Weakland/Fisch, Changements. Paradoxes et psychothérapie, éd. Le Seuil, 1975

18.     Caillé Philippe, Rey Yveline, Les objets flottants, éd. Fabert, 2004

19.     Watzlawick Paul, Nardone Giorgo, Stratégie de la thérapie brève, éd. Seuil, 2000

20.     Watzlawick/Weakland, Sur l’interaction. Palo Alto 1965-1974. Une nouvelle approche thérapeutique

21.     Cahier des charges des organisateurs d’ETS, disponible auprès de l’auteur

Les principaux auteurs que j’aimerais mieux connaître, que je souhaite que vous puissiez découvrir et qui ont été de près ou de loin source d’inspiration:

Andolfi, Amiguet, Aristote, Ausloos,

Bakounine, Barthes, Bataille, Bateson, Beauvoir, Beckett, Berne, Bertanlanffy, Boszormeyi-Naguy, Bourdieu, Breton, Butor, Buber,

Caillé, Callois, Camus, Caplow, Capra, Castaneda, Cendrars, Chouraqui, Ciolla, Cooper, Cyrulnik,

Deleuze, Derrida, Descartes, Dostoiewsky, Ducommun,

Einstein, Eliade, Elkaim, Erikson,

Fivaz, Foerster, Foucault, Frenck, Freud, Fromm, Fulcanelli,

Garcia-Marquez, Girard, Guattari,

Hall, Haley, Heisenberg, Heraclite, Hermes Trismegiste, Husserl,

Illich, Ionesco,

Jackson, Julier, Jung,

Koestler, Kundera,

Lacan, Laing, Lao-Tseu, Levy-Strauss,

Maturana, Minuchin, Morin,

Nathan,

Piaget, Prigogine, Proust,

Reich, Rey, Ricoeur, Rogers,

Sartre, Satir, Schrödinger, Schützenberger, Searles, Selvini, Shakespeare, St-Augustin,

Teilard de Chardin,

Vanotti, Varela, Verlaine, Vian, Von Foerster, Von Franz, Von Glaserfeld,

Watzlawick, White, Wittgenstein.


Publicité
Publicité
Commentaires
systemique
  • systemique. thérapie familiale. contributions. archives personnelles. Les textes présentés sont extraits de mes lectures sur Internet. Ils sont à usage privé. Dans la mesure du possible, je mets les liens des sites originaux. Commentaires bienvenus.
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Publicité
Archives
Derniers commentaires
systemique
Publicité